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Des APIES - EIP - et des enfants en rupture scolaire dans la même classe avec Jean-François Laurent



    Comme vous le savez peut-être, j'ai mis en place avec la directrice et l'équipe enseignante de l'école de l'Assomption une classe de 19 enfants de cycle trois comprenant à la fois des enfants intellectuellement précoces et des enfants en diffculté scolaire parce qu'en dessous de la norme. Que se passe-t-il ?

Quelles sont mes hypothèses ?

     - Permettre aux enfants en difficulté de reprendre confiance en eux en aidant les plus jeunes sur d'autres registres : organisation, rangements, débrouillardise, autonomie, discussion, protection...

     - Permettre aux jeunes enfants "précoces" de rejoindre leur zone proximale de développement, les obliger à aller le plus loin possible dans les apprentissages

     - Favoriser les temps de reformulation, d'explicitation des démarches par l'aide apportée aux autres enfants en difficulté.

     - Supprimer toute compétition entre enfants, les placer dans une logique gagnant / gagnant. Suppression des notes, aucune punition, mais des sanctions réparatrices, entraide entre enfants. dans ces batailles qu'ils ont vécues, souvent ils sont ressortis perdants, exsangues de toute envie d'oser apprendre à l'école.
 
     - Placer les enfants dans une logique de réussite scolaire, quelque soit leur niveau. L'école est bien ce lieu original où les enfants sont placés devant des situations qu'ils ne maîtrisent pas, mais qu'ils sont capables de maîtriser. D'où l'impossibilité de les placer tous en même temps, de la même manière, avec la même difficulté à surmonter, seul devant une connaissance à maîtriser.

      - Proposer des situations d'apprentissage qui favorisent la notion de projet. Un enfant ne travaille pas gratuitement. il travaille pour quelque chose, une raison, une motivation, un besoin. APIE comme enfants en rupture ont besoin de motivation pour s'engager dans l'apprentissage.

      - Garantir, quoiqu'il arrive la réussite. Ces enfants, blessés de  l'école, ont un besoin viséral de réussir. Ils n'en peuvent plus d'être en échec scolaire. Ils ont besoin de cette sécurité affective nécessaire à l'apprentissage.

      - Proposer un cadre bienveillant, mais ferme et stable.

     - Favoriser les signes de reconnaissance positifs pour leur permettre de prendre confiance en eux.

       -  Marier cet impossible : apprendre...dans la joie.



Profil des enfants : Privilégier l'hétérogénéité
      
        2 enfants qui arrivent directement du CP et qui suivent un CE2, 4 qui viennent du CE1, mais 2 suivent un CM1 ,4 du CE2 dont 2 suivent un CM2 et 2 un CE2, 2 qui redoublent le CM1 dont une qui a un petit niveau CE2, 1 qui passe au CM2 normalement , mais en diffculté de comportement, 2 avec un an d'avance qui passent au CM2. Ils sont officiellement 7 en CE2, 8 au CM1 et 4 en CM2. Certains ont encore 6 ans, d'autres ont déjà 11 ans. Certains sont bien agités, d'autres si timides. D'autres ou les mêmes sont là parce que, malgré l'aide du réseau, des enseignants, des redoublements, ces enfants sont encore en échec scolaire. D'autres s'ennuient en classe, n'ont plus confiance en eux, s'agitent... Même moi, je n'arrive pas à une liste exhaustive de leurs particularités. A quoi cela servirait-il d'ailleurs ?

   C'est inextricable dans une logique normative classique ! !

    Pourquoi chercher à les caser, les normer et vouloir les mettre dans des niveaux officiels ? Effectivement, j'ai choisi l'option de ne pas séparer la classe en groupes de niveau officiel ou réel, d'age, de sexe ou.... Les enfants forment une classe où tous les enfants sont mélangés en fonction de leurs choix et des miens.
       J'ai privilégié les différences de manière à favoriser l'entraide, l'interaction. mais cela ne peut pas fonctionner. En tout cas, je ne sais pas faire, si l'entrée dans les apprentissages s'effectue par les connaissances. Comment organiser une classe où certains enfants  travailleraient sur le présent de l'indicatif pendant que d'autres seraient sur le passé composé et d'autres encore sur le subjonctif présent  ?

      - Postulat : Ces enfants, comme tous les autres, mais encore plus que d'autres et de manière officielle, forte, "prismique".


    L'entrée par le projet

     Nous avons privilégié le plus possible une entrée par les projets : raconter pour une affiche ces meilleurs souvenirs, aller lire une histoire à toutes les classes, partir en classe de découverte dès le mois d'octobre, préparer des énigmes mathématiques pour une autre classe, compléter le blog de la classe (classedecycletrois.over-blog.fr)...
      - Les apprentissages sont motivés
      - Tous les enfants travaillent sur le même objet d'apprentissage avec des degrés de complexité différents. Chacun dans sa zone proximale de développement.
      - Confrontation à la tâche complexe qui nécessite de gérer de nombreux paramètres en même temps
      - Nécessité de travailler en interaction entre enfants, de s'entraider
      - Pas de compétition entre enfants, pas de notes
      - Temps de verbalisation, élaboration de grilles de critères de réussite.
     - ...


Premiers constats

     - Un enfant turbulent qui aurait pu se faire rejetr trouve d'autres enfants pour être à côté de lui. Les APIES sont gentils et généreux par essence. Ils aident volontiers.

     -  Mes grandes filles en difficulté scolaire aident des plus petits dans l'organisation. Elles renforcent une image positive qui peut leur donner confiance et leur permettre par effet ricochet de progresser, y compris dans le domaine des apprentissages.

     - Un enfant passe facilement d'un niveau à l'autre sans se sentir survalorisé ou sous valorisé parce qu'il ne suit pas son niveau officiel. Les enfants le vivent bien. Nous privilégions la réussite plutôt que le suivi du niveau à tout prix. Cela n'a pas l'air de leur poser problème.

     - Les APIE mettent du sens à leurs apprentissages. Ils ont l'air heureux et travaillent davantage. Ils voient la finalité de leur travail.

     - Les APIE aident les enfants en difficulté, sont obligé de mettre en avant le processus et en profitent eux-mêmes.

     - Un des enfants en total blocage l'année dernière en CE2 s'est mis à travailler et produire. Oui, son niveau est très bas, mais il ose écrire, apprendre. Je le sens très fragile, à gueter chacune de mes paroles et réactions devant son travail. Je ne dois pas le blesser, sinon, il se refermera de nouveau.

      - Une des grandes qui ne parlait jamais lève le doigt, répond à des questions, en, pose et a le sourire.

      - L'entraide et l'apprentissage de l'autonomie n'e sont pas gagnés. Ils me surprennent à ne pas oser s'aider les uns les autres. Ils ont besoin d'être sollicités, autorisés. Ce n'est pas spontané. Nous sentons là je crois les habitudes scolaires qui sont devenues progressivement des attitudes, longues à modifier.

       - Ils s'assoient encore à la même place. Qu'ils aient une place référente oui, qu'ils osent se déplacer en fonction des activités à mener reste encore étrange pour eux. Ils ont besoin de l'autorisation, du maître,  d'être sollicitéscomme s'ils ne se permettaient pas cette liberté.



    Et pour le prof ?

      Plutôt des signes favorables à cette expérimentation. Pour moi également, comme professeur, je n'ai pas de difficultés particulières. Je n'exerce pas par niveau de classe officiel. Mes difficlutés sont tournées vers le suivi de chacun. Que maîtrise-t-il ? Dois-je le savoir ? Est-ce que je ne les marginalise pas trop par rapport à un enseignement classique ? C'est une des raisons pour lesquelles je garde au moins deux séances de travail classique sur fichier en maths et en français.
  
      - Le blog de la classe (classedecycletrois.over-blog.fr)  a une grande importance dans le lien école famille. Beaucoup le consultent. Ils se sentent rassurés de voir leur enfant. "Nous avons l'impression d'être une petite mouche dans la classe".

       - Le travail du soir. Ils en ont très peu. La dame de l'étude rouspète parce qu'ils n'ont rien à faire...


        
       Un point à quinze jours de la rentrée positif. L'hétérogénéité de la classe n'étant pas subie, mais recherchée devient une force pour tous. "On s'enrichit de nos différences." La classe multigrade fonctionne. Nous affinerons au fur et à mesure les entrées, hypothèses, découvertes qui ne manqueront pas, j'espère, de nous surprendre, destabiliser, afin de "bouger les lignes"
     
                                         Jean-François LAURENT
 
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Qui Suis- Je ?

  • : Le blog de Jean-François LAURENT
  • : Présentation de mes activités de formateur, conférencier et écrivain dans les domaines de l'éducation : enfants intellectuellement précoces, HPI, EIP, APIE, ainsi que tout ce qui touche l'autorité, la violence, le conflit, les règles dans les établissements scolaires. Me retrouver sur le site : www.jeanfrancoislaurent.com
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