Bonjour,
Ce matin en me rasant, j'ai failli me couper en écoutant les commentaires d'auditeurs sur la petite phrase lourde de sens de Jean-François Coppé sur le désir de remettre en place un examen d'entrée en sixième.
Quelle est ma position ? Pour ceux qui me connaissent, je suis totalement contre, mais je souhaite donner des arguments à cette prise de position très ferme.
Depuis 2007, les textes qui régissent l'école se sont orientés pour une plus grande sélection, un plus grand conformisme. Les savoirs d'abord, les enfants ensuite... bref, je ne veux pas développer ici, mais un vent de nostalgie souffle pour revenir aux bonnes vieilles méthodes qui ont fait leurs preuves (et oui, exclusion des mauvais élèves ou plutôt de ceux qui n'étaient pas dans le moule, création d'une élite...).
Mais il faut une élite, le problème n'est pas là, mais que fait-on des élèves qui ne rentrent pas dans le moule ? j'en ai un certain nombre dans ma classe qui seraient bien embêtés de trouver une place dans un système qui ne laisse que peu de place à l'humain, à la créativité, la réflexion, l'intelligence.
Aussi, que fait-on des enfants qui échoueraient à cet examen ? Fin du collège unique créé en 1975 ? Collège à deux vitesses, filières ? Avant d'apporter des petites solutions du café du commerce, prenons le temps de penser l'école, le collège. Proposons une plus grande autonomie des établissements où le projet serait au coeur des débats et des actions mises en place, où l'es innovations pédagogiques ne seraient pas considérées comme étrangères et risquées !
L'idée de cet examen est bien de sélectionner. Or évaluer, c'est prélever des informations pour décider. Alors, que décide-t-on ?
Quelques idées en vrac pour le collège :
- Quatre professeurs maximum en sixième cinquième, ce qui engage la polyvalence des professeurs.
- Des séances plus longues afin de favoriser les projets de classe.
- Mise en place de responsables de niveau, de tuteurs afin que le jeune puisse avoir des lieux de parole.
- Mise en place de formations à la gestions des émotions, à une plus grande connaissance de soi, à la gestion des conflits,
- Suppression des notes et de ce système compétitif pour aller vers plus de coopération.
- Mise en place de conseils d'élèves (vie citoyenne)
- Mise en place d'ateliers de soutien, décloisonnés en petits groupes...
- Stages de langues étrangères
- Vrai projet en quatrième, troisième d'éducation aux choix (d'un avenir professionnel...)
- Plus grande liaison parents professeurs en partenariat.
Je vous communique ci-dessous un passage d'un article de Philippe Meirieu lu sur le site "le café pédagogique" que je vous recommande vivement :
... "Certains, comme J.-F. Copé, président du groupe UMP à l'Assemblée, peut-être bientôt premier ministre ou ministre de l’Éducation nationale, rêvent de rétablir l'examen d'entrée en sixième pour garantir aux élèves la maîtrise des fondamentaux. Qu'en pensez-vous ?
Un examen ne garantit jamais un niveau, il distingue ceux qui l’ont atteint et écarte les autres. Ce qui garantit le niveau, c’est la rigueur des pratiques pédagogiques au long cours. La proposition de Jean-François Copé est un nouvel avatar – et ce ne sera pas le dernier – de ce qui constitue le noyau dur de la pensée réactionnaire en éducation : la confusion entre la sélection et la formation. C’est cette confusion qui constitue l’implicite de bien des propositions de « réformes » aujourd’hui et de la frénésie évaluative qui s’est emparé de notre système : on multiplie les évaluations comme des obstacles dans un parcours du combattant pour activer le « darwinisme éducatif ». On imagine que ces évaluations formelles vont « faire travailler les élèves », quand l’expérience montre que la mobilisation sur des épreuves scolaires et la capacité à en comprendre les règles du jeu est loin d’être équitablement répartie dans le champ social. On prétend que la multiplication des évaluations permet la mise en place de remédiations quand, dans l’immense majorité des cas, elle autorise à répéter à l’infini ce qui a précisément produit l’échec. On proclame qu’on veut de la rigueur quand on choisit simplement la facilité.
La question est, pour moi, de renforcer les apprentissages, en particulier dans le domaine de la maîtrise de la langue. Elle est de définir clairement des priorités, tant dans les objectifs que dans les méthodes. Elle est d’organiser les apprentissages de manière personnalisée comme aurait pu le permettre la formule des cycles à l’école primaire, torpillée et abandonnée par la droite depuis belle lurette. Elle est dans une formation renforcée des enseignants et un meilleur travail d’équipe. Elle est, enfin, dans notre capacité collective de faire des savoirs scolaires des « objets de désir » et non des « objets de dérision » dans un monde dominé par les seules valeurs marchandes."...
Pour que le niveau monte, nos jeunes doivent gagner en confiance en eux, croire qu'ils peuvent réussir. Tout doit être fait pour les engager dans cette voie exigente de l'effort, de la réflexion, de la remise en cause de leurs propres fonctionnements d'élève, de professeur.
Tiens, je me suis éloigné de mon sujet de départ sur un examen d'entrée qui serait une régression sociale et éducative. C'est peut-être que le sujet est si pauvre qu'il ne méritait pas d'être relevé.
Bien à vous,
Jean-François LAURENT